jeudi 31 mai 2012

Blogue 15 : Fin


Ministère de l’intérieur

J’ai oublié de vous parler de mon expérience surprenante au ministère de l’intérieur lors de ma visite à Port-au-Prince avec mes partenaires il y a trois semaines. Nous nous y sommes rendus pour y déposer le dossier de projet avec l’espoir d’avoir une réponse rapide et un entretient éventuel. Nous arrivons dans la cours intérieure de l’édifice. Un garde de sécurité en complet est assis sur une chaise avec son gros gun et lit le journal. On m’a recommandé de ne pas le prendre en photo. Dommage, elle aurait été bonne. Nous sommes entrés à la réception. Des gens étaient assis dans la pièce. Un homme et une femme chacun attablés derrière un bureau vide. La femme avait un calepin et un stylo, l’homme rien du tout. Elle a pris en note nos noms et l’homme a demandé une carte d’identité à Phito en échange d’une carte d’accès. Les autres ne faisaient rien.

Nous avons alors fait le tour du bâtiment pour nous rendre de l’autre côté. Phito semblait savoir où nous allions. Nous avons là aussi croisé des gardes de sécurité avec de gros guns. Je me suis forcé de leur sourire pour ne pas les contrarier. Nous sommes enfin arrivés devant un bureau avec des portes et des fenêtres en verre fumé. Nous sommes rentrés et l’air climatisé nous a surpris, mais pas autant que la vision suivante. Dans une pièce d’environs 15’x20’ se trouvaient une dizaine de bureaux en bois massif jonchés de piles immenses de dossiers et de papiers de tout acabit. Il ne devait pas y avoir plus que deux ou trois ordinateurs. Autour de chaque bureau étaient assis cinq ou six personnes. Il n’y avait pas de place pour circuler et les gens discutaient ou se regardaient dans le blanc des yeux les bras croisés. La dame que nous voulions rencontrer nous a suggéré de sortir pour que nous fassions notre rencontre à l’extérieur.

Nous nous sommes ensuite redirigés vers la réception où Phito y est entré pour envoyer le dossier par le courrier interne comme nous l’avait recommandé la dame. C’est alors que Fritz s’est exclamé :

Fritz : - Avez-vous vu tous ces gens dans les bureaux?
Formation sur la créativité
Moi : - Oui justement, je voulais vous demander ce qu’ils font ces gens.
Patrick : - RIEN!!! Ils ne font absolument rien!
Moi : - Ils attendent pour un rendez-vous?
Fritz : - Non!!!! Ce sont des fonctionnaires de l’état. Ils sont payés pour être là à ne rien faire. Ils ont deux pauses de 15 minutes par jour et 1h30 pour dîner le midi et ils partent à 16h.
Moi : - Si au moins ils faisaient semblant de travailler…
Patrick : - Et on se demande ensuite pourquoi l’état n’a pas d’argent!!!

Incroyable quand même, non?!?!

Formation sur la créativité

Formation sur la créativité
Le concept de base de l’éducation haïtienne est de répéter ce que l’instituteur dit en avant de la classe, donc apprendre par cœur, réfléchir le moins possible car ce sont les adultes qui ont raison. J’ai réalisé en cour de route que les gens avec qui je travaillais manquaient énormément de créativité. Oui, c’est vrai que pour la plupart, ils se trouvent tout en bas de la pyramide de Maslow et que leur rêve le plus fou est souvent de juste manger le soir ou aller à l’école le lendemain matin ou devenir un "bon" administrateur comme un de mes collaborateurs qui est un administrateur m'a sorti quand je leur ai fait faire l'exercice. Mais quand on est un gestionnaire ou un administrateur d’une mairie ou le coordonnateur d’une association de jeunes et qu’on développe des projets, il faut sortir de notre zone de confort et des besoins essentiels pour faire avancer les choses. C’est comme s’ils avaient peur de se tromper… Alors ils refont toujours les mêmes projets, donc souvent les mêmes erreurs. C’est un cercle très, très vicieux comme en témoigne un peu l’histoire du pays. J’ai donc décidé de leur donner une formation sur la créativité. L’idée fut accueillie froidement au début, mais je crois que c’est parce qu’ils ne comprenaient pas de quoi il s’agissait. Finalement, la formation a eu lieu le dimanche 20 mai. Ils étaient supposé être dix-huit, huit se sont présentés.

Formation sur la créativité
Je crois qu’ils ont apprécié. En tout cas, ils ont participé… Ont-ils compris quelque chose? Est-ce que ça va leur servir? Ce n’est pas important pour moi. Ce qui est important c’est de savoir que j’ai peut-être réveillé une réflexion. Le reste fera son chemin à son rythme chez chacun d’entre-eux et selon leur niveau d’éducation et de curiosité.







Cap Haïtien

Château du roi Henri Christophe
Samedi le 26 mai, je suis partie pour le Cap Haïtien avec Doris et son mari Marcel qui est arrivé la semaine passée. Ils font définitivement partie de mon top 10 des retraités les plus "hot" que je connaisse (incluant ma tante Josée et son amie Denise). D’autant plus que je suis fondamentalement jalouse de leur santé cardio-vasculaire.  La route pour s’y rendre fut tumultueuse. En arrivant à Milot, vers 13h30, Nathalie une CV de Port-au-Prince qui travaille à la gestion des risques et désastres, nous attendait pour monter à la Citadelle. Nous avons d’abord pu admirer (de loin, car des gens riches s’y mariaient) le palais du roi Henri Christophe, malheureusement détruit partiellement par un séisme en 1842.
La Citadelle





Randonneuse "Fashion"
Nous avons ensuite pris le véhicule pour nous rendre à la Citadelle. En chemin, le camion s’est arrêté net (problème de pompe à huile). Nous avons donc du continuer la route à pied avec le guide. Il faisait chaud et ça m’a encore remis à la figure que je ne suis pas en forme. Je me trouvais très « fashion » avec ma robe soleil, mes sandales de marche et mes bâtons de randonnée. 1h30 plus tard, nous étions en haut de la très impressionnante Citadelle construite par le très mégalomane roi Henri-Christophe, que les Haïtiens se plaisent à déclarer 8e merveille du monde. La vue y était splendide et le lieu mythique. Malheureusement, le guide que nous avions grassement payé était nul et ne m’attendait pas avant de donner les explications (je prenais le temps de savourer le moment vous savez!). Somme toute, j’ai été presque aussi impressionnée qu’au Machu Picchu.

Doris et Marcel
Mur extérieur de la Citadelle
Canon à l'effigie du roi Soleil




















 


Doris et Marcel


Ça m'a fait bien rire comme nom de salon!








 




Le lendemain matin le partenaire de Doris est venu nous chercher à l’hôtel. Je n’ai jamais vu quelqu’un qui conduisait aussi lentement!!! S’en était dangereux! Je forçais quand il tournait! Il nous a amenés dans le centre-ville historique, pas très loin de l’hôtel d’ailleurs (je crois que ça aurait été moins long d’y aller à pied). Nous nous sommes aussi rendus à Vertière où a eu lieu la dernière bataille de l’indépendance en 1806. Au magnifique hôtel Henri-Christophe j’ai proposé que Marcel et moi descendions pour que Doris et Noly puissent se rendre à leur rencontre. Marcel et moi avons donc fouiné dans la cours de l’hôtel et nous sommes promenés dans les rues du Cap qui sont très agréables, les Capois étant très courtois (ça faisait changement de Dessalines). En fin d’avant-midi, je me suis octroyé le droit de faire une sieste.


Cathédrale du Cap Haïtien



   



Monument à l'effigie de la bataille de Vertière, dernière bataille pour l'indépendance 1806


En début d’après-midi Doris, Noly, sa femme Ruth et un de leurs amis (qui a conduit Dieu merci!), sont venus nous chercher pour aller à Labadie. Nous avons failli ne pas partir puisque la voiture ne voulait pas démarrer (décidément, les véhicules au Cap ont de la misère!). C’est à force de frapper sur les fils du démarreur que la voiture s’est décidée à nous emmener à la plage.

Labadie est le seul lieu touristique assumé d’Haïti. On y trouve une immense plage privée et cadenassée où les gros bateaux de croisière sillonnant les Caraïbes s’arrêtent. Ça a plus l’air des glissades d’eau du Mont St-Sauveur qu’autre chose, eau turquoise en prime. Juste à côté étaient stationnées de petites chaloupes à moteur en bois. Ruth était terrorisée et le chauffeur s’amusait avec cela en lui disant que si le bateau coulait, on n’aurait qu’à nager jusqu’à la rive.

Nous sommes arrêtés à Belly Beach pour nous acheter une bière et avons repris l’embarcation pour nous rendre à plage Paradis. Et laissez-moi vous dire que c’était le paradis pour vrai. Sable fin, eau turquoise chaude et source d’eau fraîche.

On m’a dit que je méritais bien cette dernière petite escapade. Je le crois aussi. J’ai travaillé fort et je ne sais quand je reviendrai en Haïti alors aussi bien en profiter!

Rapport de fin d’affectation

Mon rapport a été approuvé par Lucie. J’ai ma réunion de fin de mandat jeudi soir. Mes partenaires ont trouvé un terrain pour construire le YMCA et l’entente est en train de se signer avec les partis concernés. Ils ont des idées de projets plein la tête et sont motivés. Mardi soir ils ont décidé qu’ils se verraient deux soirs par semaine et que Phito ferait les rappels puisque je ne serais plus là. Ils m’ont demandé s’ils pouvaient m’écrire s’ils avaient des questions et pour me tenir au courant des avancées du projet.

Je pars vendredi pour Port-au-Prince où je passerai la fin de semaine avec Marie-José, Doris, Marcel et Geneviève. Nous irons marcher en montagne et nous prélasser à la piscine. Marie-José fera de la fondue, ce qui bouclera la boucle puisque c’est ce qu’elle m’a préparé lors de mon premier soir le 7 février.

J’aurai trouvé ça dure. J’aurai trouvé ça long. J’aurai vécu toutes sortes d’émotions allant de l’ennui à l’émerveillement et de la frustration au bonheur. J’aurai eu chaud. J’aurai été malade. J’aurai été témoin d’horreurs humaines et des plus beaux sourires. J’aurai vu des dépotoirs à ciel ouvert et les plus beaux paysages de la planète. Cette expérience en aura été une qui m’aura fait grandir comme jamais. J’aurai aimé et détesté ce pays si injustement ravagé. Je ne sais pas si je reviendrai, mais j’en garderai toujours un souvenir positif et inspirant.

Merci de m’avoir suivi pendant quatre mois. J’ai hâte de vous retrouver, de vous parler, de vous regarder, de vous embrasser et surtout de vous entendre!

Catherine




Notre gardien André avec sa petite.


jeudi 17 mai 2012

Blogue 14 : La Grande Anse


Souper de pad thai avec la reine du social et les princesse + Robert

Dans l’intimité de mes partenaires (ou presque…)

En réunion... J'ai l'air de savoir de quoi je parle han?
De lundi à mercredi dernier, je me suis rendu à Port-au-Prince avec trois de mes partenaires pour diverses rencontres importantes. Ce fût l’occasion pour moi d’apprendre à les connaître un peu mieux et j’avoue que je me suis bien bidonné…

Au ministère de la jeunesse, des sports et de l'action civique
7h15 am : Nous sommes en voiture et je me réveille car ils conversent en créole avec le chauffeur. Je crois comprendre au bout de 10 minutes qu’ils parlent de religion, ce qui m’étonne car c’est un sujet sur lequel on ne s’obstine pas en Haïti.


Moi : - Les gars, vous êtes vraiment intenses pour 7h15 le matin, vous ne trouvez pas?
Phito : - Haha! Tu n’aimes pas parler de religion?
Moi : - Je n’embarquerai pas là-dedans…
Fritz : - Non, mais regarde, je leur expliquais que je trouvais ça bête que tout le monde pense que Dieu va sauver le pays. Je dois bien être un des seuls Haïtien en Haïti à ne pas être croyant.
Patrick : - … (Il est adventiste et extrêmement croyant)
Moi : - Bon, écoutez les gars… Voici mon point de vue. J’ai eu une éducation catholique, j’ai fait un choix à un moment de ma vie. Et je considère que je mets en pratique les belles valeurs de l’humanité aussi bien et parfois même mieux que bien des gens dévots.
Fritz : - Les gens perdent leur temps à prier plutôt qu’agir!!! Que Dieu existe ou pas, ce n’est pas Lui qui va régler nos problèmes, c’est nous. Tout ce qu’Il peut faire c’est de nous donner du courage. (Je n’aurais pas pu mieux dire…)
Patrick : - … C’est vrai que les gens oublient d’agir…
Phito : - Haha…
Arold (notre chauffeur sauvé par Dieu lors de sa maladie) : - …

Notre première réunion a eu lieu au ministère de la jeunesse, des sports et de l’action civique, avec le directeur de la jeunesse. Si ma gang de bozos se grouillent le derrière, je crois qu’ils sont disposés à financer une partie du projet. J’ai même suggéré que le ministère investisse dans un salaire de directeur des services récréatifs, ce qui a été reçu positivement. Le directeur a même proposé d’utiliser Dessalines comme exemple pour les autres municipalités du pays.

En réunion avec YMCA Haïti
Vous devez savoir qu’en Haïti, tout s’appelle Dieu ou Jésus quelque chose. Par exemple : Sang de Jésus autoparts, Don de Dieu loto, Jésus est grand coiffure, Dieu qui décide transports (mais mon préféré reste Père Noël Loto). Le Jésus en croix est peint à qui mieux mieux sur les autobus, les taptaps, les devantures de magasins, etc. Nous roulons donc sur la route de Delmas vers le Épidor ou nous comptons nous substanter. Tout le monde est silencieux.

Fritz : - Heureusement que Jésus est du domaine public, parce qu’il y a quelqu’un qui ferait beaucoup d’argent avec ça!
Moi : - HAHAHA!!!! C’est la meilleure que j’ai entendue depuis longtemps! Surtout venant d’un Haïtien…
Fritz : - Hehe!
Nous avons donc mangé au Épidor. Malheureusement, le chauffeur a dû aller chercher un autre conseiller volontaire au Champ de Mars (on n’a pas le droit de rester là trop longtemps, ça peut facilement péter dans ce coin de la ville) et nous avons patienté 1h30 au resto, ce qui nous a donné amplement le temps de discuter. Fritz et Patrick en ont profité pour aller faire une course. En attendant…

Phito : - Je ne le crois pas que ton copain a pu rester fidèle pendant 4 mois…
Moi : - Euh… Ben, pourquoi il me mentirait là-dessus? Et pourquoi n’en serait-il pas capable si moi j’en ai été capable?
Phito : - Impossible! Un homme ne peut se retenir plus que deux semaines!
Moi : - Les Haïtiens sont faibles!
Phito : - Ton copain est fou.
Moi : - …
Phito (regard triomphant) : - Ha! Tu sais plus quoi dire, han?
Moi : - Phito, t’as jamais entendu parler de ton amie la main droite???
Phito (un peu décontenancé par mon commentaire) : - … Hahaha!!!!
Les gars (revenant de leur course) : - De quoi vous parlez?
Phito : - Catherine pense que les hommes sont capables d’être fidèles.
Patrick : - Mais oui on est capables!!! Faut juste un peu de volonté!
Moi : - Tu vois! Et puis de toute manière Phito, maintenant que tu es marié, c’est fini les p’tits ménages!!!
Phito : - Ha… Heu… Pfff…
Moi : - Vous réagiriez comment si votre femme vous trompait?
Fritz (sourire en coin) : - Ben, c’est clair qu’on la met à la porte de la ville et qu’on la lapide! (J’aime bien l’humour de cet homme. Je crois qu’il pourrait devenir mon ami!)
Moi : - Hahaha!
Fritz : - Sans blague, l’homme on le félicite pour sa bonne prise et la femme se fait souvent abandonner.
Moi : - Phito, tu ne trouves pas ça un peu injuste?
Phito : - Mouin… Vu comme ça…

On a aussi eu une longue conversation sur le féminisme. Phito nous a discourut sur le fait que l’égalité entre les hommes et les femmes était un faux problème. Les deux autres l’ont ramassé bien comme il faut (heureusement!). Cela dit, je ne le critique pas. Il y a beaucoup de chemin à faire en Haïti à ce sujet. Je vous dirais que ça se résume bien dans cette phrase que j’ai utilisée à plusieurs reprises suite à des commentaires comme : les femmes ne veulent pas s’impliquer, les femmes sont paresseuses, les femmes sont bien dans leur rôle, etc.

Moi : - Les gars, si les femmes n’étaient pas occupées à torcher vos bobettes, à torcher vos maisons, à torcher vos enfants, elles auraient le temps de s’impliquer. Les femmes ont des idées et de grandes idées, qui plus est. Il faudrait juste que vous commenciez à les écouter! ET à torcher vos (criss) de bobettes vous-même!

Le lendemain, nous sommes allés rencontrer Bob Duval qui a fondé l’Athlétique d’Haïti qui œuvre dans Cité Soleil. Un bonhomme fascinant, un visionnaire qui a contribué avec brio à stimuler les jeunes d’un des plus dangereux bidonvilles des Amériques.

Mercredi, nous avons eu une rencontre avec YMCA-Haïti. Encore là, si les gars se grouillent le popotin, je crois qu’il devrait y avoir une belle collaboration qui pourra se développer.

Rencontre avec l'Athlétique d'Haïti
De jeudi à lundi, j’ai pris des vacances pour aller dans la Grande Anse. À mon retour, j’ai appelé Fritz qui m’a dit qu’ils avaient eu une réunion avec les autres afin de leur faire un compte rendu de nos rencontres. Ils ont pris des décisions, informé le maire, et entamé des démarches concrètes pour que le projet avance. Bref, mes petits sont en train de devenir grands!!! Je pars l’âme en paix, à partir de la semaine prochaine, ça ne m’appartient plus.


 



Rozo prise 1

Ma belle Chelda!
Jeudi matin à 6h, Doris, Jonathan et moi avons mis le cap sur la Grande Anse, conduits par Gerry, le chauffeur le plus étrange que j’aie jamais rencontré. Le trajet fut beaucoup plus agréable que mon expérience en taptap de l’année dernière. Ça nous a pris 6h30 (vs 10h en taptap). Puisqu’il était tôt, nous sommes arrêtés prendre le thé à Rozo. J’étais très émue de revoir Gérard, mon papa Haïtien d’adoption (à mon vrai papa, y’a personne qui va jamais pouvoir te remplacer, ne t’inquiète pas!!!). Quand les classes se sont terminées, les enfants m’ont entouré, ils me fixaient de leurs fabuleux yeux avec leurs grands sourires en murmurant « Mme Catherine!!! » comme si j’étais une apparition… Myrriame devenue si belle, Rachelle si grande, Fedro toujours aussi touchant avec ses grands yeux timides et ma Chelda que j’aime tant!!! Ils étaient tous là… Il y en avait toujours un pour me taper sur l’épaule, me souriant l’air de dire « Tu me reconnais han? Tu es contente de me voir han? »… « Mais oui mon timoun, je te reconnais et tu ne peux pas savoir combien je suis heureuse de te voir! »

Les quatre jolies demoiselles
Dans la cours arrière, il y avait quatre toutes petites filles que je ne connaissais pas. Quand je me suis approché d’elles et m’exclamant : « Mais vous êtes donc bien belles vous quatre??? », il y en a une qui s’est littéralement jeté à mon coup. Je pensais qu’elle ne se détacherait jamais. Vous imaginez que mon cœur a fait 46 tours à ce moment-là!!!

J’ai alors vu Santona qui riait en faisant la lessive. Puis, Evens, Pedro et maman Madou sont venus me saluer chaleureusement. Madou semblait très affaiblie par la thyphoïde qu’elle a eue cet hiver. Elle était tellement contente de me voir qu’elle s’est écrié « Catherine!!!! W gwo! ». « Merci Madou! ». Ici, se faire dire qu’on est grosse c’est le compliment ultime. Ça veut dire qu’on a l’air en santé! Mais vous n’êtes pas obligés de me le dire si j’ai engraissé quand je vais revenir, ok? C’est acceptable venant de Madou, mais c’est tout!

Je n’avais pas réalisé jusqu’à maintenant combien j’étais attachée à ces gens. Quand je suis arrivé chez eux l’été dernier, je n’allais pas très bien. J’étais en train d’essayer de remonter à bouts de bras et avec mes ongles, le puits dans lequel j’étais tombé depuis deux ans. Sans le savoir, ils m’ont lancé la corde dont j’avais besoin pour finir de me hisser. Je leur en serai donc éternellement reconnaissante.

Après ces retrouvailles émotives et le fameux thé à la cannelle de Madou, Doris, Jonathan et moi sommes allés nous baigner. J’ai retrouvé l’odeur étrange du chemin nous menant à la plage. Le cours de la rivière avait changé. Le bassin où j’avais l’habitude de me laver était à sec. Mais c’était toujours aussi beau! Sur le chemin, des enfants me criaient « Mme Catherine, où est Meigge? Où est Valentine? Et Thomas, Fabrice et Ève-Marie??? ».

Gérard s’est plaint de ne plus recevoir de subventions et ça m’a fait de la peine. Le travail qu’il fait est remarquable. Mais il se fait vieux et il n’a pas tant d’énergie pour courir après les bailleurs de fonds… Et moi, qu’est-ce que je peux faire? Le problème, c’est que c’est toujours à recommencer. Une organisation finance un projet sur une certaine période de temps et après… Ben après, ce n’est pas encore réglé la situation du pays, les gens ont pas plus d’argent et les projets meurent… Et à ce moment-là, c’est de l’argent pitché par les fenêtres… Et c’est des enfants qui se retrouvent encore sans avenir. Alors… Moi, qu’est-ce que je peux bien y faire???
Jonathan dans son lit de princesse
Massage

Doris au Scrabble









En fin d’après-midi, nous avons quitté Rozo pour nous rendre à Jérémie. Nous avons dormi dans une jolie et confortable petite auberge. Le resto où nous avons mangé était correct. Doris nous a torchés au Scrabble en soirée, mais à force de jouer avec elle, je m’améliore. En regardant une carte de l’Afrique, je me suis mis à parler de la République Démocratique du Condo. Jonathan m’a demandé si je ne parlais pas plutôt du plateau Mont-Royal. Je suis vraiment n’importe quoi des fois… Tk, fallait être là. Le lendemain matin, Doris m’a fait un massage. C’est vraiment pratique de voyager avec une massothérapeute!

Les Abricots

La porte arrière de notre gîte
La route entre Jérémie et les Abricots et très mauvaise. Heureusement que nous avions un pick-up quatre par quatre. J’ai regretté amèrement de ne pas avoir mis un soutien gorge soutien extrême, mais sinon, au bout de deux heures, nous avons débouché sur le plus joli endroit que j’aie eu la chance de voir dans ma vie (ou presque… en tout cas, au moins dans le top 10!). Notre auberge était directement sur la plage et jolie comme tout. Nous allions dormir en écoutant le bruit des vagues… Beaucoup plus agréable que le bruit des klaxons et des gens qui crient! Après avoir pris notre lunch, nous sommes partis à la recherche de l’atelier de Mme de Verteuil, une amie de Régine qui n’était malheureusement pas là. Nous avons visité l’atelier de broderie de nappes. Ensuite, nous sommes allés à sa maison avec son assistante et nous avons pu acheter des nappes. J’ai eu toutes les misères du monde à choisir la mienne. Ça prend entre deux et quatre mois broder une nappe comme celles-là, à la main. J’ai vraiment hâte de la mettre sur ma table chez moi!!!! Mais que je vous vois la tacher avec du vin ou de la nourriture!!!

Atelier de broderie de nappes
À la chaleur qu’il faisait, nous nous sommes ensuite dépêchés à redescendre pour pouvoir nous garocher dans la mer. On a tout juste eu le temps de se rafraîchir qu’un orage tropical s’est déclaré. J’ai donc été forcée, pauvre de moi, à lire et à faire une sieste oh combien méritée!!!

Souper au couché de soleil
Nous avons soupé une fois l’orage passé, dans un petit resto à deux portes de l’auberge. Celui-ci étant aussi directement sur la plage, nous avons été OBLIGÉS de manger du homard et du poisson frais en regardant le fabuleux coucher de soleil. Vraiment, des fois je trouve que la vie est bien injuste…

Le lendemain matin, je suis allé marcher sur la plage après m’être baigné. Une fille d’une vingtaine d’années m’a abordé. Elle s’est mise à me parler de son organisation de jeunes qui œuvrait au niveau du reboisement et qui était en train de développer un projet de culture du cacao tout en respectant une charte environnementale très sévère.

Moi : - Tu sais Farah, je vais te dire un secret.
Farah : - Ah oui?
Moi : - Oui… L’avenir de ce pays réside dans les femmes. Vous êtes fortes, courageuses et pleines d’idées géniales!
Farah : - Merci!
Moi : - Je suis très sérieuse.

Sur les entre-faits, son ami Alex est arrivé, il venait d’entendre ce que je venais de dire et me regardait avec de gros yeux.

Moi : - Tu n’es pas d’accord avec ce que je viens de dire?
Alex : - Non.
Moi : - Eh bien, il va falloir commencer à travailler ensemble… Tu ne peux pas nier que les projets de Farah sont super intéressant et à l’avantage de la région qui a tout avantage à se développer.
Alex : - Oui, bon… C’est vrai.

Pêcheurs aux Abricots
Vraiment, de super beaux jeunes, se sentant bien isolés dans leur petit coin de paradis, mais remplis d’espoir et de détermination. Ils m’ont chaleureusement invité à revenir pour la fête patronale au mois d’août. Décidément, les habitants de la Grande Anse sont les plus accueillants du pays!

Avec Mme Antoinette la tenancière de l'Auberge





Rozo prise 2

Nous sommes retournés à Rozo pour y être pour la réunion scoute à 15h. Ils nous ont chanté une chanson de bienvenue, puis se sont séparés, les scouts et routiers d’un côté et les louveteaux de l’autre. J’ai suivi les plus jeunes évidemment. À un moment, Evens est sorti de la pièce, Pedro est venu et m’a demandé si je pouvais leur montrer le Grand Hurlement en vue de la promesse. Et première chose que j’ai su, je me suis retrouvé à animer une réunion de deux heures toute seule sans préparation. À un moment, un jeune des éclaireurs a tenté de s’immiscer dans notre réunion. C’est à contre cœur que j’ai dû le réexpédier dans son groupe… Je crois qu’il aurait préféré passer du temps à jouer avec moi que de se faire discourir sur la théorie du scoutisme par Pedro.
Jonathan et Doris ont fini par se joindre à nous. À la fin de la réunion, Doris m’a fait le plus beau compliment « J’pense que les jeunes avaient pas envie que ça finisse… ».

Nous avons passé le reste de l’après-midi à discuter avec Gérard. Amos, Duckerson, Herbyson et Ricardo sont venus me saluer. C’est étrange, j’ai remarqué que les Haïtien ne sont pas très démonstratifs quant à leurs émotions. Ils m’ont tous dit qu’ils étaient contents de me revoir, mais ne me l’ont pas du tout démontré… Ils avaient l’air gênés…

Avec Myrriame
La petite Cristelle endormie
Nathalie, Junie et Jean-Philippe
Mes timouns
Après le souper, nous avons joué aux Dominos avec Gérard. Les enfants pensionnaires et quelques petits voisins nous ont entourés pour nous aider à battre papa Gérard! Nathalie, Rachelle et un autre petit garçon ont passé plusieurs heures à me jouer dans les cheveux. Myrriame me faisait des câlins à tout bout de champs. Junie passait son temps à me prendre la main. C’était beaucoup beaucoup d’amour d’enfants en même temps. Et ça m’a frappé de plein fouet, peut-être que c’était la dernière fois que je les voyais ces enfants-là… On ne sait pas ce que l’avenir nous réserve et on ne doit jamais dire jamais, mais c’est quand même du domaine du probable que je ne les revois jamais… Et puis, j’ai un peu eu envie de pleurer.

Je ne suis pas allé dormir sur le toit et je l’ai amèrement regretté dès l’instant où ma tête s’est posé sur l’oreiller. Il devait faire 1000 degrés dans la pièce… J’ai fini par m’endormir malgré tout, mais je ne peux pas dire que ce fut d’un sommeil réparateur.

Doris, Jonathan, moi et papa Gérard
Le lendemain matin, nous avons déjeuners (omelette à la saucisse à hot dog, aux oignons et à l’huile ti malice… genre de déjeuner de lendemain de veille mais qui passe pas super bien pas lendemain de veille). Puis, nous avons fait nos aux revoir. Après avoir embrassé Gérard, je me suis dépêché d’aller m’assoir dans l’auto et de mettre mes lunettes de soleil avant de me transformer en fontaine italienne. C’est donc le cœur gros mais heureuse d’avoir pris la décision d’y aller, que j’ai quitté Rozo et cette merveilleuse famille qu’est celle des Apollon.



Port Salut

Petite caye sur la route

Jérémie


Y'a pire comme paysage...