mardi 28 février 2012

Blogue 5: Quelques anecdotes


Tricot : Pour quelle qu’absurde raison que ce soit, je me suis mise en tête d’apprendre à tricoter pendant que je suis ici. D’aucuns diront que c’est plus ou moins inspirant de manipuler de la laine à 30 degrés et ils ont raison. Samedi, j’ai donc décidé d’honorer la mémoire de ma grand-mère qui avait tenté tant bien que mal de me faire aimer cet art de la broche quand j’étais petite. C’est donc armés de ma broche circulaire, de ma pelote de laine bien enroulée, du patron (en anglais, pfff facile!) et de mon ordinateur branché sur Youtube, que j’ai entrepris de faire ma première tuque à vie, bien campée dans le divan moelleux du salon. J’ai d’abord trouvé une vidéo me montrant comment enfiler les mailles. Cette étape terminée, j’ai eu besoin d’un petit rappel des bases des « à l’endroit », « à l’envers »… Une heure plus tard, tout allait toujours bien, j’étais prête à attaquer le patron (en anglais, pfff facile!) que la charmante vendeuse m’avait très bien expliqué au magasin lors de mes achats à Montréal. Mais le problème, c’est que dans ma profonde assurance que de toute manière ça me reviendrait et que bah, je suis super habile de mes mains, pis que franchement c’est pas si difficile que ça faire une tuque, je n’avais pas vraiment écouté les explications de la madame. P1, K2, P3 pour moi, c’est des numéros de places de stationnement au centre d’achats Rockland!!! Pas des mailles de tricot!!! J’ai donc décidé de tout défaire et de m’en tenir à la maille à l’endroit pour quelque temps encore. J’ajouterai une fleur en tissus et des boutons en revenant pour faire jolie… J'aurai au moins hérité du don en couture de ma grand-mère!

Ma pizza!!!
Le Club Indigo : Dimanche, mes copines de Port-au-Prince et moi, nous étions donné rendez-vous à mi-chemin, à la plage du très convoité Club Indigo (anciennement un Club Med). Le complexe est très joli, on m’a dit que les chambres sont petites et désuètes, mais peu importe, la plage est propre et il y a des chaises longues pour tout le monde! Que demander de plus! C’est donc vers 9h30 que nous nous sommes confortablement installés sous notre petite hutte de paille sur le bord de la mer avec nos noix de coco transpercées d’une paille et quelques couches de crème solaire. Sincèrement, je crois que je vis une histoire d’amour passionnel avec la mer des Caraïbes… Même les poissons venaient me donner des becs sur les chevilles! En tout cas, vers midi, nous avons réalisé que nous avions faim et nous a pris l’idée saugrenue de commander une grande pizza aux légumes et une frite. Nous avons rapidement reçu nos boissons. Et l’attente commença. À noter que le four à bois se trouvait à peu près à 50 mètres de nos chaises. Eh bien, ça a pris 2h30 avant d’avoir notre pitance. Heureusement, c’était bon. Bref, en Haïti si vous voulez vous faire livrer une pizza, vous êtes mieux de vous armer de patience ou de la faire venir par Fedex, ça prendra moins de temps.

La Minustah : Je suis arrivée au Club Indigo en même temps qu’un convoi de casques bleus brésiliens remplis de testostérone et énervés comme des garçons de 14 ans. Ça m’a fait sourire, sans plus. Plus tard dans la journée, j’étais avec Élise et nous nous dirigions vers la piscine pour nous y rincer de l’eau salée de la mer. Arrivée au bord de ladite étendue d’eau bétonnée, Élise se tourna vers moi :

-       Heuuu… Est-ce que tu te sens un peu comme un morceau de viande en ce moment?
-       Heuuu… Un peu… As-tu un peu l’impression d’être dans un fantasme gai?
-       Heuuu… Un peu…

C’est qu’il y avait à peu près une centaine de pectoraux bronzés qui nous observaient de la tête aux pieds. Nous avons donc fait quelques longueurs de piscine jusqu’à ce que Élise me lance un :
-       On sors-tu? Je n’ai pas envie de tomber enceinte dans la piscine.

On s'est dit toute la journée qu'on s'ennuyait de la neige
Et j’acquiesçai en me dirigeant vers l’échelle et la paire de pectoraux qui me dévisageait, la plus proche… Merde, je pensais pourtant que mon bikini me couvrait bien… Prochaine fois, j’apporte mon speedo « one piece » bleu… Ou pas… :-P (Malheureusement, quand je suis retournée pour prendre des photos, le mirage s'était évaporé...)

Les Stars de Dessalines: Ce matin j’ai été invitée par le capitaine de l’ASD, l’équipe de foot semi-professionnelle qui est passée, tenez-vous bien, en deuxième division!!!! Les Dessaliniens ne sont pas peu fiers de cet exploit, qui pourtant me laisse relativement indifférente puisque je ne connais absolument rien au foot. Cela dit, je fais semblant que ça me passionne pour ne pas les blesser et parce que somme toute, ça m’enlèverais un peu de crédibilité dans le cadre de mon mandat. Par contre, j’insiste (et mes amis des scouts comprendront pourquoi) pour leur dire que je ne peux pas jouer. Et systématiquement la question vient :

-       Mais pourquoi?
-       Parce que je vais vous faire perdre…
-       Meuh non, c’est pas grave, c’est juste un jeu…

Me semble oui, que c’est juste un jeu!

Entrée du terrain de jeu
Terrain (beurk!) de jeu
Enfin bref, je me présente donc comme convenu, sur le terrain de jeu (qui fait partie de 70% des défis de mon mandat, tant ça fait dure…). Une trentaine de jeunes adultes entre 18 et 30 ans jouaient au soccer sous le regard admiratif d’enfants, d’adolescent et de vieux. À un moment, on siffla un arrêt de jeu et Lafontant, mon hôte, me prit par le bras et m’installa dans le milieu d’un cercle formé de tous les joueurs de l’équipe qui attendaient que je prenne la parole. Mais pour dire quoi!?!?!? J’ai donc bafouillé des salutations et je leur ai demandé leur collaboration. Pourtant, je ne suis pas du genre à me laisser intimider… Il faudra que j’apprenne à jouer au foot en rentrant…

Gagner un enfant : Sur le terrain de foot, en train de regarder l’entraînement, je discute poliment avec les messieurs de tous âges autour de moi. Je pose des questions sur le foot, le terrain, le sport chez les jeunes filles etc. Tout à coup, un haïtien d’une vingtaine d’années en chemise immaculée se retourne pour se joindre à la discussion. À un moment, LA question vient sur la table, dans un français fortement assaisonné de créole :

Le garçon : - Êtes-vous mariée?
Moi :          - Oui. (Maintenant je réponds oui, c’est beaucoup moins compliqué.)
Le garçon : - Et vous avez des enfants.
Moi :          - Non, pas encore. Mais je préfèrerais avoir un enfant avec mon mari. (Ça aussi ça m’épargne beaucoup de propositions plus ou moins indécentes… Et ça leur évite de penser que mon "mari" est un incompétent! Hehe!)
Le garçon : - Mais oui, bien sûr, avec votre mari. Mais voulez-vous gagner un enfant?
Moi :          - Pardon? Mais non, je ne peux pas gagner un enfant! Si j'en veux un, je dois le faire!!!
Le garçon : - …!
Moi :          - …? 

Après réflexion faite, je crois qu’il me demandait si je voulais avoir un enfant. Le verbe avoir en créole se dit « gen » (à prononcer « gain »). Une mauvaise traduction du créole au français pourrait effectivement donner « gagner ». Il faut vraiment que j’apprenne à parler créole!

Un enfant et une mangue : En retournant vers la maison ce matin, je croise mon voisin d’une douzaine d’années dont je ne me rappelle pas le nom (quand tu te fais présenter des dizaines de personnes par jour, tu peux pas retenir les noms). Il est super gentil, m’a demandé des millions de fois de lui donner un ballon de foot et me salue régulièrement à travers la grille de la maison. Lucie le connaît très bien et il connaît tous les conseillers. En marchant avec moi…

-       Madame Catherine, ou pral vin wè pratike foutbòl mwen nan Samdi?
-       Je vais essayer oui de venir voir ta pratique de foot… (Son entraîneur venait de passer quelques minutes à me dire que ses joueurs n’avaient pas d’équipement approprié et qu’il peinait à avoir des ballons).
-       Ok… Madame Catherine, Mwen pa janm manje ankò jodi an. Ou pa ka ban m 'yon bagay?
-       … (côliss, y'a pas mangé encore, pis il mangera sûrement pas…) Ok, vient avec moi, je vais te donner une mangue. Mais tu me promets que tu vas la manger pour être bien concentré à l’école cet après-midi. Ok ?
-       Ok.
-       Et je ne pourrai pas t’en donner à tous les jours…
-       OK, mèsi Madame Catherine, mèsi anpil !

Y’as-tu quelqu’un qui va commencer à se grouiller le cul et trouver de l’argent pour que les enfants mangent avant d’aller à l’école dans ce pays !?!?!? Voilà c'est naïf et irrationnel, mais c'est dit.

Des enfants au Carnaval à Dessalines




jeudi 23 février 2012

Blogue 4: Kenskoff


Kenskoff

Le premier soir que j’étais en Haïti, Catherine et Élise, deux autres volontaires que j’avais rencontré en formation m’ont parlé d’une randonnée qu’elles allaient faire avec Stève, un collègue de Québec. Cette randonnée partait de Kenskoff dans les hauteurs du département de l’Ouest, et se rendait jusqu’à Seguin, de l’autre côté des montagnes. Certains vont même jusqu’à redescendre de l’autre côté pour se rendre à Jacmel. La décision a donc été prise rapidement que je me joindrais à eux pendant la fin de semaine du carnaval national pour vivre cette aventure.

Étant donné mon historique dorsale qui a fait en sorte que ma forme physique a été littéralement réduite à néant, je me suis d’abord informé auprès de Stève notre organisateur, pour m’assurer d’être capable de suivre le groupe. Extrait de sa réponse :

« Ne sois pas trop inquiète. Comme expliqué dans les schémas, on marche surtout sur une crête, donc ça va être quand même physique mais pas «extrême». Et on n'est pas pressé non plus. 19 km, c'est le max. Si le départ se fait un peu plus loin que je ne le pense, ce sera 16 ou 17 km. Une montée plus robuste au 2/3 de la journée sur 1 km. Puis on descend les 5 autres vers l'auberge. Si on prend 6 heures pour marcher ça, on arrivera en fin de PM, 15h30 - 16h00. Ne t'en fais pas, si j'ai déjà été beaucoup plus en forme «dans ma jeunesse», je le suis beaucoup moins aujourd'hui... car je traîne un bon 20 livres de trop depuis plusieurs années, en raison de mon amour pour la cuisine! Faque... »

C’est donc avec détermination et malgré mon amygdalite, que nous nous élançâmes tous les quatre sur la route de Kenskoff vers 8h45 samedi matin. Le paysage devint rapidement pittoresque et époustouflant. La route, très mauvaise, ne permettant qu’à quelques chauffeurs de motos-taxis téméraires de passer, nous avons croisé bon nombre d’ânes, de petits chevaux et de femmes porteuses de gigantesques paquets sur leurs têtes (je leur voue un culte sans bornes, mais je préfère de loin mon sac à dos bien ajusté et la santé de mes vertèbres cervicales).

Passant de petits villages en petits villages et admirant la culture des légumes à flanc de montagne, nous nous sommes rapidement rendu compte, que la crête était beaucoup plus accidentée que ce que l’image satellite ne nous l’avait laissé entendre. La montée plus robuste au 2/3 de la journée était en fait la plus robuste d’une bonne quantité de montées robustes… Mon orgueil en a pris un coup à plusieurs reprises, me faisant « clencher » par des enfants, les fameuses femmes en « Crocs » troués, portant 30 kilos de patates sur leurs têtes et tutti quanti.

Pendant plusieurs kilomètres, nous avons eu droit à une suite royale d’enfants que nous croyions fascinés par notre passage (dont un arborant les couleurs du Canadien de Montréal !!!). En arrivant à un immense dépanneur au milieu de nul part, nous avons rapidement compris le subterfuge. Notre petit attroupement étant en fin de compte fort habitué au passage de touristes blancs comme nous, rêvait secrètement d’une collation. Stève a donc acheté une dizaine de gâteaux « comparaître » (une spécialité de Jérémie dans la Grande-Anse, que j’ai eu la chance de déguster l’an dernier mais qui dans notre cas s’avérèrent dégueulasses). J’ai tant bien que mal tenté de mettre un peu d’ordre dans la distribution des vivres en demandant à la douzaine de garçons de se mettre en ligne. Peine perdue, ils se garochèrent littéralement sur Stève, certains réussissant à obtenir plus d’une portion. Enfin bref, un enfant étant un enfant peu importe où dans le monde, la situation me rappela des centaines d’images de louveteaux se chamaillant pour un bout de pain sec malgré le festin qui leur avait été servi quelques heures avant. À la différence que probablement que la moitié de l’attroupement présent n’avait probablement pas mangé à sa faim depuis quelques temps…

Au bout de ladite dernière montée robuste et après plusieurs pauses plus ou moins longues pour nous sustenter, reprendre notre souffle ou prendre des photos, quelle ne fut pas notre surprise de tomber sur un représentant Natcom derrière son kiosque qui vendait des cellulaires. On se serait cru dans un sketch de Samedi de Rire…

En redescendant un peu, nous dirigeant vers l’Auberge, nous sommes rentrés dans le parc de la Visite, parc de conservation (du moins, ils essaient que ce le soit…) abritant une des dernière pinède de l’île. Ça sentait bon, on se serait cru dans le parc de la Mauricie si cela n’avait pas été des immenses agaves en fleurs dispersées un peu partout dans la forêt. Magique !!! J’attendais juste que des fées sortent de leurs cachettes. J’étais heureuse, l’odeur me rappelait ce que j’aime du Québec et la chance que j’ai de pouvoir encore faire de l’activité physique malgré les problèmes de dos qui m’ont ralenti pendant quelques années.
 
En arrivant à la très rustique mais oh combien bucolique auberge, nous avons pu assister à un magnifique coucher de soleil avant que la maisonnette ne soit replongée dans la brume humide de la montagne. Nous étions à 1900 mètres d’altitude et il faisait froid. Très froid…

Après cette première nuit emmitouflés dans des draps approximativement propres et des couvertures aux effluves de moiteur, nous nous sommes levés pour déguster un petit déjeuner chaud fort apprécié. Le BBQ de mouton de la veille ayant été absorbé rapidement dans notre recherche de chaleur, les omelettes et le café passèrent très bien. Malgré nos muscles endoloris, nous avons décidé de prendre le sentier que remontait le ruisseau vers la cascade malheureusement à sec à ce temps-ci de l’année. C’est donc sur un grande roche plate que nous avons passé une partie de la journée à nous prélasser au soleil pendant que Stève faisait son « tough » en se jetant dans le bassin glacé. Étonnant quand même que les écarts de température puissent être aussi extrêmes.


Le lendemain, sur le chemin du retour, nous avons pu admirer le paysage à l’envers. La route fût un peu moins difficile, mais il serait de vous mentir que de ne pas avouer le plaisir que nous avons eu que notre chauffeur soit à l’heure au rendez-vous pour que nous puissions immédiatement nous écraser sur la banquette du véhicule.

Mardi gras a été consacré plus à l’entretien de notre gras de ventre que de nos muscles. Marie-Josée est venue passer l’après-midi avec nous autour de la piscine. Nous avons mangé et bu et remangé et rebu. Kampaï !












Pêchier


Callas










NB : Ma rencontre avec YMCA-Haïti a super bien été. Un partenariat devrait se faire pour un centre à Dessalines. Yé !

vendredi 17 février 2012

Blogue 3: Hôpital, Partenaires, St-Valentin et titre de noblesse


Titre de noblesse
Chaque famille a sa façon d’élever ses enfants. Chaque culture a sa notion de la politesse. Ici, sans vouloir porter de jugement de valeur, la politesse est directement proportionnelle au niveau d’éducation reçue (un peu comme chez nous finalement). Cependant, elle a aussi ses particularités. Par exemple, à chaque fois que je termine une rencontre avec un partenaire et que je lui demande s’il a autre chose à ajouter, il se confond en remerciements comme si j’étais le Dalaï Lama ou Mère Teresa ou je ne sais quelle divinité (ok certains d’entre-vous diront que je le suis, mais ces personnes ne sont pas objectives, je vous l’assure). Étant donné que nous sommes quatre blancs à habiter la ville (il y a quelques religieuses aussi, mais je ne les ai pas encore vus), disons que notre passage dans la ville, ne manque pas d’attirer l’attention. Il est donc systématique d’entendre « Blanc, blanc, blanc!!! », ou encore « Mon blanc!!! » et celui qui détient la palme d’or, le très populaire « Blanc, banm kòb (donne-moi de l’argent)».

En revenant de notre balade dans les champs dimanche dernier, John et moi sommes tombés sur un groupe de garçons d’environ 10 ans. Ils avaient attaché une ficelle aux pattes d’un magnifique oiseau coloré. Malheureusement, je n’ai pas pris de photo de la pauvre bête, j’étais trop traumatisée… Le garçon tenant la ficelle :
-       Mon blanc, banm kòb!
Moi :
-       Non, pas mon blanc, Madame.
Le garçon :
-       Madame mon blanc, banm kòb!
John :
-       Mais moi aussi je veux de l’argent!!!
Moi :
-       Madame mon blanc… On dirait un titre de noblesse, comme la duchesse de Mont-Blanc ou je ne sais trop. Ça me plaît!
John :
-       Madame pas madame, c’est tout aussi insultant si tu veux mon avis!
Moi :
-       Vous allez le détacher cet oiseau j’espère! Ça lui fait mal ce que vous faites!
Le garçon :
-       Oui, oui nou détaché. M’gain mangé avant! (ça s’écrit pas comme ça en créole, mais c’est pour la compréhension)
Moi (les yeux exorbités) :
-      
John :
-       Allez vient, on continue…

Partenaires
Cette semaine, j’aurai enfin réussi à revoir mes partenaires individuellement. J’ai même rencontré le maire de Marchand Dessalines dans son minuscule et poussiéreux bureau orné de vieux bouquets de roses en tissus qu’on retrouverait au Dollarama. Il a été très sympathique et nous a donné son appui. Phito qui est le nouvel organisateur communautaire mandaté par le ministère des sports, des loisirs et de l’action civique à la ville de Dessalines, est très motivé. Mais le pauvre homme bégaye comme jamais. À chaque fois que j’ai à lui parler (et j’aurai à lui parler trèèèèès souvent dans les quatre prochains mois), je pense à King’s Speech et ça me déconcentre. Je sais que je dois tout simplement le laisser parler et être patiente et c’est ce que je fais, mais avec mon léger déficit d’attention, je finis toujours par perdre le fil de la conversation et à ne plus savoir de quoi il me parle. M’enfin, il est gentil, très motivé et particulièrement structuré. C’est grâce à lui que j’ai rencontré le maire et les scouts. J’ai aussi rencontré deux autres de mes partenaires cette semaine, les choses se clarifient et nous aurons du pain sur la planche! Nous nous sommes entendu pour organiser une table ronde avec des jeunes. Il a fallu déterminer ce qui définissait le terme « jeune »… Ici, jeune ça veut dire 15 à 30 ans…

Moi : - …
Océan : - Ouais, je sais…

Alors, nous ciblerons les 12-20 ans pour le moment.

Un autre bon coup, dont je suis quand même un tout petit peu fière… À la recommandation de Caroline Morissette, j’avais contacté la fille qui s’occupe des liaisons entre YMCA Montréal et YMCA Haïti. J’ai donc envoyé un courriel aux gens de YMCA Haïti, me disant que je n’aurais soit pas de nouvelles, soit des nouvelles qu’éventuellement un jour, avant mon départ peut-être. À ma grande surprise, quelques heures après l’envoi de mon courriel je recevais un appel de la coordonnatrice des activités et de la programmation pour une rencontre avec elle et le secrétaire général de l’organisme. Je les vois donc jeudi de la semaine prochaine, après le carnaval. Je ne me serai pas acheté des vêtements propres pour rien finalement!

St-Valentin
Afin de noyer mon chagrin d’être loin de mon valentin (parce que tout le monde sait combien c’est important pour moi cette fête… humhum…), j’ai décidé de faire un gâteau. N’ayant pas de poudre à pâte, j’ai dû demander à maman une recette avec du soda à pâte. Ce qu’elle s’empressa de me donner par Facebook. J’ai donc cuisiné le gâteau sous le regard attentif des deux ménagère, Faïs et Claire-Renée. Gâteau blanc aux pépites de chocolat. Le stress était grand, je leur avais promis de leur faire goûter. S’il était mauvais ou raté, la honte que j’aurais… J’ai donc décidé de faire un caramel au lait pour mettre sur le gâteau. En bout de ligne, j’ai donné un énorme morceau à Faïs qui en a donné à ses quatre enfants et son mari le soir venu. Depuis ce temps, elle me présente ses enfants un à un et ils me disent tous combien ils ont adoré la sucrerie. Finalement, j’aime bien la St-Valentin!

Hôpital
Samedi le 4 février, jour du mariage de ma sœur avec son doux, je me suis réveillé avec les amygdales enflées. Le lundi suivant, c’était la veille de mon départ, je n’avais absolument pas envie de perdre mon temps à la clinique. J’avais encore des courses à faire et je devais finir de préparer mes bagages. Je n’y suis donc pas allé. La semaine dernière, je me suis dit que ça passerait, qu’en me gargarisant avec de l’eau et du sel et en prenant de l’huile d’origan, cet anti-biotique naturel, ça passerait, mais non… À mon grand désarroi, mercredi matin, je me suis levé avec les amygdales carrément dans la bouche. Faïs a donc décidé de m’amener à l’hôpital. Première étape : traverser le bâtiment pour se rendre au bureau d’inscriptions. Deuxième étape : passer devant tout le monde aux inscriptions (je vous laisse deviner pourquoi). Troisième étape le triage… Deux madame, ne parlant pas français, dans la salle d’attente. La première me présente le pèse personne. Sérieux, comme ça devant tout le monde??? Je me résigne donc à me faire peser. Les dames sont contentes, je suis pesante et ici c’est signe de santé et de beauté, yé! Je m’assois ensuite à côté de la deuxième dame qui me tend un thermomètre électronique comme j’en ai un chez moi. Je le regarde, je la regarde… Ok… Je prend le thermomètre et le porte à ma bouche, lui faisant aveuglément confiance puisque je ne l’ai pas vu le stériliser ou le nettoyer. C’est à se moment que je reçois un grand coup sur le bras et que je réalise que tous les patients de la salle d’attente, Faïs et mon coloc Thalès qui nous avait accompagné, sont morts de rire. Sous le regard péremptoire de la dame, je comprends que c’est sous mon bras que je dois mettre l’engin… Mon metteur en scène au CEGEP m’avait une fois dit que tant qu’à se planter, aussi bien le faire avec panache. Je suis donc allée jusqu’au bout de l’humiliation en l’assumant et en riant de bon cœur moi aussi.

dimanche 12 février 2012

Blogue 2: Bienvenue dans le vrai monde!



Bienvenue en Haïti !!! On m’avait préparé, on m’avait averti et je savais… Mais j’espérais que ce serait un peu différent pour moi. J’ai eu ma rencontre avec les partenaires, du moins, certains partenaires. Ils étaient cinq présents. Des messieurs tous très gentils et pleins de bonnes intensions. Nous nous sommes présentés, résumés nos parcours respectifs. Ils m’ont tous dit combien ils étaient contents que je sois là. Et puis la réunion s’est terminée et puis rien. Lucie la coordonnatrice leur a dit que j’étais là pour les faire travailler et pas pour tout faire moi-même. Tout de même, à la fin de la réunion, rien. Je leur ai dit de me dire quand je pourrais aller les voir dans leurs organismes, rencontrer les jeunes et les autres artisans du projet, mais toujours rien…

Vendredi matin, j’ai eu une réunion avec Lucie. Nous avons discuté longtemps. Elle m’a donné un peu plus d’information en me disant que si le mandat était à réécrire, elle le changerait complètement. Et je suis retournée chez moi de l’autre côté de la rue légèrement découragée et en me demandant ce qui m’avait pris d’aller me foutre dans ce merdier. Ne vous inquiétez pas, je ne regrette rien et vous ne m’entendrez pas me plaindre pendant quatre mois. Si jamais ça devient le cas, je reviendrai car je me suis juré de ne plus jamais être malheureuse !!!

Enfin bref, après ma sombre journée de vendredi, je me suis promis de prendre le temps de décompresser pendant la fin de semaine. Samedi matin je me suis donc rendu au marché avec Lucie et Geneviève une autre CV avec qui je crois que je vais bien m’entendre. Nous avons acheté des fruits et des légumes et j’ai décidé que j’en avais assez de la déprime. J’ai donc acheté un joli panier pour étuver le riz et un balai artisanal. En revenant, j’ai accoté le balai dans un coin de ma chambre car on dit que ça chasse les mauvais esprits. J’ai ensuite imprimé quelques photos que j’ai collé de part et d’autre de mon lit (des photos du mariage, une photo de Momo) et j’ai volé un fauteuil en rotin dans la salle commune d’en haut qui ne sert jamais. Décorer ma chambre un peu m’a fait le plus grand bien !

Le marché de Dessalines n’a rien à voir avec le marché Jean-Talon ou le marché Atwater. Enfin, ce n’est pas vrai. C’est un marché. On y vend des fruits, des légumes, des œufs, du pain, des fèves séchées, de la viande (à mes risques et périls), toutes sortes de bébelles et du charbon. À la différence que les couleurs ne sont pas les mêmes. Au marché ici, on ne retrouve pas les étales colorés et propres de ceux de chez nous, ni les amoncellements esthétiques de fruits et légumes. Tout est un peu gris, un peu "boueteux", un peu "bouateux", ça sent le poisson et l'humidité, de sorte qu’au début on est un peu réticent, un peu dégoutté.  Mais quand on prend le temps de parler aux marchands, de négocier avec eux (parce qu’ils ont évidemment un prix de blanc et un prix haïtien), de faire des blagues, on découvre les mêmes personnages colorés et souvent sympathiques que dans nos marchés, mais à la façon de leur culture, de leur réalité. J’ai hâte de parler créole pour pouvoir apprécier à fond le marché, d’y aller toute seule, de découvrir se qui se trouve derrière ces sourires et ces moues.

Marie-Josée est arrivée en avant-midi pour passer la fin de semaine avec nous. En soirée nous nous sommes fait venir du poulet du St-Hubert BBQ local. Nous avons bien bu et bien mangé Lucie, Marie-Josée, les quatre autres conseillers volontaires (John, Geneviève, Thalès et Jean-Joseph) et moi. Les deux Canado-Haïtiens qui sont avec nous ont longuement parlé de politique haïtienne avec Marie-Josée et Lucie. C’était bien d’avoir leurs points de vue à tous les quatre. J’ai écouté le plus attentivement que le vin me le permettait, afin de tenter de comprendre du mieux que je le pouvais cette situation si complexe qui hante le pays depuis beaucoup trop de décennies.  Nous sommes ensuite allés nous promener dans le centre-ville un peu, bref au coin de la rue. J’ai rencontré Franky, un Canado-Haïtien de 65 ans qui passe ses mois d’hiver ici et qui y tient un dépanneur avec sa jeune et très jolie femme de 28 ans. Son autre femme et ses autres enfants endurent les joies de l’hiver à Montréal pendant ce temps-là ! Haïti!

Ici, les soirées se passent souvent au dépanneur du coin. Les propriétaires sortent les haut-parleurs et mettent de la musique entraînante. Les gens prennent une bière, discutent, rient se draguent. Les chiens rachitiques passent, les chats se grattent, les soûlons essaient d’attirer l’attention en dansant des strip-tease ratés et pathétiques.

Vers minuit je suis allé me coucher fatiguée, repue et pompette, mais satisfaite de ma soirée avec mes nouveaux compagnons.

Ce matin John, malgré sa gueule de bois intense, s’est levé pour nous faire des crêpes. J’avais apporté du sirop d’érable et nous nous en sommes délectés avec du bon café et du melon d’eau acheté cette semaine à Gonaïves. Marie-Josée est repartie vers 10h30 pour Port-au-Prince. Je la reverrai bientôt et nous avons déjà prévu fêter mon anniversaire chez elle à la fin du mois de mars.

En fin d’avant-midi, mon très original co-loc John a tenu sa promesse et m’a amené marcher dans les champs de légumes et les rizières. Nous avons dû marcher 7 kilomètres. C’était vraiment très joli. Le paysage est très différent de Roseaux où je me trouvais cet été. Au lieu de la plage paradisiaque, la ville est surplombée de montagnes où se trouvent six forts. L’empereur Jean-Jacques Dessalines les avait fait construire afin de se protéger des Français, des Anglais et des Espagnols. Mais je reviendrai là-dessus une autre fois, quand je serai allé les visiter et que j’aurai l’histoire complète. Les terres cultivables sont très riches ici. En ce moment, nous trouvons beaucoup d’oignons, de tomates et de poivrons. C’est une région très riche pour la riziculture et le café aussi. La balade fut agréable, il ne faisait pas trop chaud et les nuages nous protégeaient du soleil. J’avais mis de la crème, mais j’ai quand même brûlé tout croche et me suis fait piquer les jambes par des moustiques. J’ai aussi eu la peur de ma vie quand j’ai réalisé qu’un chien s’était arrêté sec avec son museau dans ma jambe. Je croyais qu’il allait me mordre, mais pour une obscure raison il est reparti. Je crois avoir une bonne aura auprès des chiens parce que ce n’est pas la première fois qu’un chien méchant devient une lavette en entrant en contact avec moi. Je touche du bois pour que ça continue !!! La faim nous appelant, nous sommes rentrés par la route, contents et ressourcés.






PS: Tout le monde me jure n'avoir presque jamais vu de grosses araignées en Haïti. J'en ai eu une qui est revenue deux soirs de suite dans ma salle de bain et a fini écrasée sous une revue. 3" de diamètre!!! C'est gros et svp arrêtez de me dire que j'ai une perspective distortionnée de ces bêtes!!! Elles sont grosses et poilues et me TE-RRO-RISENT. Voilà, c'est dit! J'espère que c'est ma dernière histoire d'anthropode pour les quatre prochains mois!

jeudi 9 février 2012

Blogue 1: Mon arrivée en Haïti




Mon avion a donc atterri à Port-au-Prince mardi à 13h50 avec une heure de retard à cause de problèmes de détecteurs de fumée au décollage.  Durant le trajet, on a eu des problèmes de décompression de la cabine. Ça n’a pas été annoncé, mais je le savais parce que j’ai eu un malaise en même temps que les deux agents de bord qui me servaient à boire. Elles m’ont dit qu’elles pensaient savoir ce que c’était et de leur dire si je filais mal une autre fois. Finalement ça s’est replacé. J’étais bien dans l’avion puisque j’ai changé de place voyant qu’il y avait trois sièges de libres au centre de l’avion. Je ne me rappelle même plus du film que j’ai visionné. Ça ne devait pas être très bon…



Une fois la douane passée, je me suis loué un chariot. Je savais que c’était 2$ US, que j’avais préparés. Le monsieur responsable des chariots me parlait en anglais, faisant semblant qu’il ne comprenait pas le français bien articulé que je m’efforçais de lui parler.

« - Four dollars madame.
-       Non monsieur,  2$.
-       Fous dollars for two.
-       Mais monsieur, je ne veux qu’un seul chariot !
-       Ah, mais il fallait le dire madame ! »
-        
J’ai vraiment essayé de m’organiser toute seule pour ramasser mes bagages et transporter mon chariot jusqu’à la sortie. Peine perdue, les « travailleurs autonomes » assignés à l’aide aux bagages se sont carrément garochés sur moi pour m’aider. Ils sont futés !

« - Vos coupons de bagages !
Moi, pensant être dans le tort ou quelque chose…
-       Ok, ok… Un instant, je ne sais pas où je les ai mis… Voilà !
-       Parfait, je m’en occupe. Je serai avec vous jusqu’à la fin.
-       (pour moi-même… Merdeuuuuuu !!!). Mais monsieur, je peux vraiment m’organiser toute seule.
-       Vous m’avez dit une valise noire, une valise bleue, c’est ça ?
-       Non, une valise rouge et un sac à dos vert.
-       Pa pwoblem. Je suis avec vous jusqu’au bout.
-       Non monsieur, je vais vous donner des sous après avoir récupéré mes bagages et après je m’organise toute seule, ok ?
-       Ok…

Trois dollars US plus tard et après plusieurs bleus sur les mollets occasionnés par les coups de chariots que le monsieur derrière moi me donnait pour sortir de l’ère de réception des bagages, je surgis dans le long corridor qui mène à l’extérieur de l’aéroport.
« - Madame, taxi ?
-       Pa besoin.
-       Madame de l’aide pour vos bagages.
-       Non meci, pa besoin.
-       Madame, madame, PCV-Haïti ?
-       Oui ?
-       Ah, je travaille toujou pou PCV les mardis.
-       (Pour moi-même merdeuuu… encore…) Mais je peux pousser mon chariot toute seule !!!
-       Mais je travaille pou PCV tous les mardis…

Et le monsieur de carrément s’accrocher au coin de mon chariot pour m’accompagner (je le poussais moi-même quand même, complètement exaspérée !) Choc culturel ? Non, parce que je l’avais déjà vécu. Exaspération, définitivement !!!

Au bout, du long corridor et toujours avec ma nouvelle décoration accrochée à mon chariot, j’ai été accueillie par Kettie la chef de projet et Daniel, son chauffeur. Mais la première personne qui a attiré mon attention, c’est Marie-Josée dans sa jolie robe-tailleur ivoire et ses souliers de madame qui me criait « Attend, attend, faut que je prenne une photo pour rassurer la famille ! ». Une fois cela fait et Marie-Josée partie au travail, je suis montée à bord du véhicule et ai retrouvé Jean-Joseph que j’avais rencontré en formation et qui était arrivé un peu plus tôt par un vol d’American Airlines.

Nous avons été transportés jusqu’au guest house (très luxueux !) du CECI à Pétion-Ville. J’ai rapidement retrouvé Élise et Catherine, que j’avais rencontrés en formation. Nous nous sommes baignés dans la piscine, nous avons discuté et ensuite, nous nous sommes préparés à aller souper chez Marie-Josée. Au menu guacamole et tostitos et une fondue au fromage (deux en fait), achetée chez Hamel ! Bon vin, histoires amusantes. Bref, un souper de fille pas tellement différent de ceux qu’on aurait fait chez nous ! À 10 heures, nous avons dû partir car nous avions déjà dépassé notre couvre-feu (le chauffeur nous a gentiment attendu !).

Mercredi matin, je me suis levé vers 7h45 pour manger avec les filles. Ensuite, j’ai eu un petit « briefing » avec la chef de projet sur les règles de sécurité, le téléphone et d’autres détails. Je suis allée me faire une épicerie de base qui m’a coûté la peau du cul ! M’enfin, j’ai ma moutarde de dijon, mon huile d’olives et mon vinaigre balsamique (et une bougie à la vanille pour mettre dans ma chambre pas décorée), donc je suis en business ! Lucie, ma coordonnatrice et John, mon nouveau coloc sont venus nous chercher avec Arold le chauffeur. Le trajet s’est bien déroulé.  J’ai dormi une grande partie du trajet, ce qui est normal dans mon cas. Je suis une piètre co-pilote. Nous sommes arrivés à Marchand-Dessalines vers 17h30. Thalès, mon autre coloc nous attendait avec un souper que Phaïs, la ménagère, avait préparé. John m’a servi un très apprécié pastis. Ensuite, autre breifing par Lucie cette fois, sur les règles de vie. Ma chambre est grande, le lit est confortable, mais il n’y a pas de décoration, je remédierai à la situation sous peu ! Je suis déjà relativement installée. Finalement, je travaillerai surtout de la maison. Ce qui est bien, mais ne justifie plus mes achats de vêtements faits à Montréal. C’est tu plate, je les porterai quand même !

Cet après-midi, j’ai ma première rencontre avec mes partenaires. Patrick, qui s’occupe des activités jeunesse et des communications à la mairie et deux autres personnes qui s’occupent d’organisations de jeunes et d’équipes sportives. Ensuite, je travaillerai à développer un plan de travail. J’ai donc environ une semaine pour mettre en marche mon cerveau et m’adapter à la chaleur et au rythme de vie ici.

Ce soir, nous déciderons si nous allons au carnaval de Jacmel en fin de semaine. La fin de semaine suivante, un coopérant de Port-au-Prince organise une randonnée de Kenscoff à Seguin, dans les montagnes. 19 km de marche le samedi et au retour le lundi, et 12 km dans un parc de conservation le dimanche. Ça, je veux vraiment y aller, même si j’ai peur de trouver ça rough le 19 km… Étant déterminée à perdre mon 3 kilos de trop autrement qu’en étant malade, je ferai probablement l’effort ! À suivre, avec des photos!